Qu’est-ce qui fait une publicité ou une communication efficace ?

En tant qu’a­gence de créa­tion de marque, nous par­lons rare­ment de com­mu­ni­ca­tion et de publi­ci­té. Pourtant, les der­nières recherches éta­blissent clai­re­ment qu’il n’y a pas de com­mu­ni­ca­tion ou de publi­ci­té effi­cace, qui génèrent des ventes, sans de solides et per­ti­nents fon­da­men­taux de marque, que la créa­ti­vi­té ne s’exerce pas “hors sol” mais bien dans le cadre défi­nit par la marque.

Nous avons aujourd’­hui une petite idée de la façon dont la publi­ci­té fonc­tionne et génère des ventes. Grâce aux recherches menées au cours des deux der­nières décen­nies (c’est récent…) par l’Institut Ehrenberg-Bass, la London Business School, l’IPA et autres, nous en savons plus aujourd’­hui sur ce qui est effi­cace : Il vaut mieux se concen­trer sur la péné­tra­tion que sur la fidé­li­té, le prix plu­tôt que le volume, tirer par­ti de l’é­mo­tion, uti­li­ser un mix de média, inclure la télé­vi­sion si on peut se le per­mettre, et viser l’ESOV (Excess Share Of Voice).

En pre­nant les Awards rem­por­tés comme indi­ca­teur de créa­ti­vi­té, on constate que la publi­ci­té la plus créa­tive génère jus­qu’à onze fois plus de crois­sance de part de mar­ché pour le même bud­get que les publi­ci­tés qui n’ont pas rem­por­té d’Awards. Selon Nielsen, le fac­teur créa­ti­vi­té repré­sen­te­rait 47 % de l’im­pact sur les ventes.

Cependant on constate aujourd’­hui que les cam­pagnes pri­mées ne génèrent pas autant de crois­sance qu’au­pa­ra­vant. Aux der­niers Cannes Lions, on parle même d’une “crise de créativité”…

Qu’est-ce que la “bonne créativité” ?…

On recon­nait sur­tout la « bonne créa­ti­vi­té » à son impact . La « bonne créa­ti­vi­té » sti­mule la noto­rié­té, car les gens sont plus sus­cep­tibles d’en par­ler et de la par­ta­ger. Elle est plus sus­cep­tible d’ob­te­nir une cou­ver­ture média­tique. Ce sont des mul­ti­pli­ca­teurs de SOV (Share Of Voice). Elle ins­talle la notion de qua­li­té ou de tout autre attri­but atten­du par le consom­ma­teur, et dimi­nue la sen­si­bi­li­té aux prix.

Ce que nous savons d’une “bonne créa­ti­vi­té” est résu­mé dans le rap­port de WARC : “La créa­ti­vi­té est plus effi­cace lors­qu’elle est dis­tinc­tive, émo­tion­nelle, nou­velle, bien bran­dée (clai­re­ment rela­tive à la marque) et a une cer­taine lon­gé­vi­té.”

Être distinctive

Pour être effi­cace, la publi­ci­té doit être facile à recon­naître et doit se démarquer.

Pour être “facile à recon­naitre”, la publi­ci­té doit s’ap­puyer sur une struc­ture mémo­rielle et sur l’exis­tence — ou la capa­ci­té de construire — une image men­tale. Cette image men­tale, ce sont des élé­ments visuels, ver­baux ou audio qui sont liés de manière unique à la marque, depuis le nom, le logo, en pas­sant par le slo­gan, le jingle, la forme de l’emballage, jus­qu’au per­son­nage de marque, qui encap­sulent tous les valeurs clés de l’en­tre­prise ou de l’or­ga­nisme et créent une recon­nais­sance immé­diate. Il n’y a donc pas de cam­pagne ou de publi­ci­té effi­cace sans des fon­da­men­taux de marque solides et dis­tinc­tifs. La marque est « le centre et la rai­son de l’i­dée créa­tive » (Dominic Twose & Polly Wyn Jones, “Creative effec­ti­ve­ness”, Admap 2011).

Quant à se démar­quer, et en pre­mier lieu se démar­quer dans sa caté­go­rie, c’est tout le talent d’un bon créa­tif, de savoir navi­guer habille­ment entre les conven­tions créa­tives de la caté­go­rie et com­ment les défier comme nous avons pu le faire en uti­li­sant des codes des années 70 dans la refonte de l’i­den­ti­té de marque pour CoopGo.

Être nouvelle

Rien n’est nou­veau. Tout existe ou a été fait. L’originalité est un mythe parce que rien ne vient de rien. Ce qui pro­duit l’ef­fet de sur­prise, c’est la nou­veau­té contex­tuelle… La créa­tion de l’i­den­ti­té de marque de la Clinique Vétérinaire Lingostière est une très bonne illus­tra­tion de nou­veau­té contex­tuelle et de com­ment être “dans les codes” tout en étant distinctif.

La longévité

Le temps est un fac­teur clé dans la réus­site. Il per­met la répé­ti­tion, il per­met l’en­ri­chis­se­ment. Au-delà de la pro­messe, il per­met d’ap­por­ter des preuves.

Le rôle de l’émotion dans la “bonne créativité”

L’élément le plus impor­tant et le plus com­plexe est l’é­mo­tion. Comment le tra­vail créa­tif sus­cite-t-il l’é­mo­tion afin de maxi­mi­ser son impact commercial ?

Dans ses livres Lemon et Look Out, Orlando Wood arrive à la conclu­sion que la crise de la créa­ti­vi­té est due à une pré­do­mi­nance du cer­veau gauche dans notre culture et donc dans la publi­ci­té. Le cer­veau gauche est davan­tage asso­cié à la concen­tra­tion, à l’o­rien­ta­tion vers un objec­tif, à la mesure géné­rique, logique, lit­té­rale, tan­dis que le cer­veau droit est large, vigi­lant, syn­cré­tique, spé­ci­fique et englobe la méta­phore, les rela­tions et l’ambiguïté.

Les recherches de Wood, étayées par des don­nées et des ana­lyses rigou­reuses, montrent que les tropes du cer­veau gauche sont deve­nus domi­nants au cours de la der­nière décen­nie : les acteurs posant de face et fixant le public, les carac­té­ris­tiques abs­traites du pro­duit, le fait que les corps ne soient pas mon­trés dans leur inté­gra­li­té (frac­tion­ne­ment du corps), les mots à l’é­cran, les mono­logues et les adjec­tifs uti­li­sés comme noms sont tous plus cou­rants dans la publi­ci­té moderne et moins effi­caces pour atti­rer l’at­ten­tion, sus­ci­ter des émo­tions et donc avoir de l’impact.

Inversement, les carac­té­ris­tiques du cer­veau droit telles que la spé­ci­fi­ci­té, les expres­sions faciales, les inter­ac­tions humaines, le mou­ve­ment et le tou­cher humain, les his­toires avec des per­son­nages, l’i­nat­ten­du, une scène dans laquelle l’in­ha­bi­tuel se pro­duit, l’hu­mour, le jeu de mots, la méta­phore et la musique mélo­dique (à fort impact émo­tion­nel), sont moins cou­rants mais plus effi­caces. Ce que nous avons fait pour Langeline, marque lan­cée en 2021 qui a immé­dia­te­ment conquis son public avec un impres­sion “brand love”, en éten­dant la réflexion sur la marque à la direc­tion artis­tique et au brief des pho­to­graphes pour les shoo­tings des enfants.

Wood sug­gère que nous avons dépouillé la créa­ti­vi­té de son huma­ni­té en l’exa­mi­nant à tra­vers une feuille de calcul.

Source : Warc