Comment piloter sa marque en temps de crise

Entre risque…

Un cer­tain nombre de res­pon­sables com­mu­ni­ca­tion sont actuel­le­ment ten­tés de sus­pendre leurs cam­pagnes, s’in­ter­ro­geant sur l’im­pact sur les ventes des dif­fu­sions actuelles et sur la façon dont les annonces peuvent être per­çues par des per­sonnes en confi­ne­ment. D’autres s’a­daptent (ou tentent de s’a­dap­ter) à la situa­tion, avec plus ou moins de succès.

Suspendre, réduire ou poursuivre son plan de communication

A la pre­mière réac­tion consis­tant à tout sus­pendre, la socié­té d’é­tude Kantar a très vite appor­té plu­sieurs élé­ments de réponse.

Par expé­rience, si la sus­pen­sion ou même la réduc­tion des cam­pagnes a peu d’im­pact dans le très court terme, sur plu­sieurs mois, une réduc­tion de la pré­sence se chiffre en perte de PDM et de noto­rié­té. C’est une ten­dance très dif­fi­cile à redres­ser, d’au­tant plus si des concur­rents ont pro­fi­té de cette absence pour prendre de la part de voix (Publication Warc /​ Kantar).

Concernant la per­cep­tion des annonces conçues avant la crise, Kantar confirme que le COVID-19 n’a pas modi­fié les com­por­te­ments et opi­nions vis à vis de la publi­ci­té. Il n’y a pas de rejet face à des scènes ou des pro­duits non com­pa­tibles avec notre style de vie actuel. Il ne s’a­git donc pas de sus­pendre les cam­pagnes ni de s’in­quié­ter du fait que les situa­tions mon­trées ne sont actuel­le­ment pas appropriées.

Les cam­pagnes pro­gram­mées de longue date ont donc tout leur sens. Il reste à consi­dé­rer les oppor­tu­ni­tés qui sont là mal­gré tout et com­ment cer­taines marques se sortent de cet exer­cice avec succès.

Et opportunités…

Plus de valeurs

Certaines marques sai­sissent actuel­le­ment l’occasion de prou­ver que leurs valeurs, notam­ment celles de bien­veillance, d’at­ten­tion aux autres, d’en­ga­ge­ment socié­tal, qui ne sont pas pour elles que des mots mais des prin­cipes qu’elles sont capables de mettre en actes, cha­cune à son échelle, selon ses moyens et son domaine d’activité.

Le groupe LVMH mobi­lise ses usines de par­fums pour pro­duire des gels hydro­al­coo­liques dis­tri­bués gra­tui­te­ment, après avoir fait une dona­tion de 200 M€ pour la recons­truc­tion de la cathé­drale Notre-Dame. LVMH met clai­re­ment en pra­tique les enga­ge­ments publiés sur son site : “Culture, res­pon­sa­bi­li­té sociale ou envi­ron­ne­ment… LVMH et ses Maisons mobi­lisent res­sources et com­pé­tences au ser­vice d’initiatives en faveur de la socié­té.”

Il ne s’a­git pas de “bien­veillance”. La bien­veillance n’est pas la valeur ultime. On peut faire des choses bien et com­mu­ni­quer de façon appro­priée (comme Nike) sans avoir la bien­veillance en valeur dominante.

Cela sous-entend que ces marques ont clai­re­ment iden­ti­fié leur valeurs (ce ne sont pas de mots sor­tis d’un cha­peau), qu’elles sont capables de les mettre en action de façon col­lec­tive. Ces actions ne sont pas per­çues comme oppor­tu­nistes mais bien en cohé­rence avec la per­cep­tion que l’on a de la marque sur le temps long (long­temps avant, pen­dant et long­temps après la crise).

Plus de sens

Les star­tups wever et Keeseek fusionnent leurs pla­te­formes pour accom­pa­gner les soi­gnants appe­lés en ren­fort dans leur mobi­li­té et leur recherche de loge­ment dans le pro­jet sah­mia.

Ces star­tups ont culti­vé le sens de leur inno­va­tion, elles ont iden­ti­fié pour­quoi elles innovent, au-delà de l’existence d’un besoin et de la tech­no­lo­gie pour y répondre. L’une comme l’autre cultive l’en­ga­ge­ment socié­tal, wever en faci­li­tant l’ac­cès au tra­vail et le déve­lop­pe­ment éco­no­mique des per­sonnes, Keeseek en faci­li­tant l’ac­cès au loge­ment pour les tra­vailleurs dépla­cés. Ce sens pré-exis­tait à la crise et est vali­dé par leur initiative.

Plus de lien et d’empathie

NiceCactus, pla­te­forme d’e-sports, offre 3 mois d’a­bon­ne­ment à ses joueurs sans obli­ga­tion d’a­chat. Dans ce domaine, la com­mu­nau­té, le sen­ti­ment d’ap­par­te­nance est un moteur d’acquisition et de fidé­li­sa­tion (à par­tir du moment où les pré-requis tech­niques sont atteints).

Noliju, marque de run­ning life­style, met en ligne des vidéos d’exer­cices à faire chez soi.

En revanche dans d’autres sec­teurs comme le swim­wear, offrir des réduc­tions n’au­ra aucun effet ni sur les ventes ni sur la marque : les achats étant liés à un contexte ou une pers­pec­tive concrète (vacances) sont repor­tés. La marque est hors contexte.

Pour réus­sir cet exer­cice, il s’a­git d’i­den­ti­fier la nature de la rela­tion entre la marque et son audience, quel est le rôle que joue la marque dans le pro­ces­sus d’in­di­vi­dua­tion de la per­sonne ou dans la recherche d’intégration/​acceptation au groupe.

Ces marques ont là l’oc­ca­sion de res­ser­rer la rela­tion avec leurs inter­lo­cu­teurs. Cela vaut de l’or… pour l’a­près covid.

Plus d’authenticité et de justesse

L’important de savoir ce que l’on est vrai­ment, authen­ti­que­ment en tant que marque et en tant que com­mu­nau­té fédé­rée sous cette marque. Cela demande un tra­vail de fond sans conces­sion. Là encore, et pour resi­tuer la marque, il s’a­git d’être “vrai” sur le temps long : que les com­por­te­ments et pro­messes soient justes et prou­vés avant, pen­dant et après la crise.

Après la crise, les opportunités

Des marques nou­velles vont appa­raître, comme sah­mia. D’autres sor­ti­ront conso­li­dées par la jus­tesse de leur atti­tude et de leurs rela­tions. D’autres enfin, conti­nue­ront à ne vendre que des pro­duits ou des tech­no­lo­gies (ce ne sont donc pas des marques) et, n’ayant pas créé de rela­tions fortes, seront expo­sées au très grand risque de sub­sti­tu­tion dans les stra­té­gies de diver­si­fi­ca­tion d’après-crise.

Les cartes seront rebat­tues. Sens, authen­ti­ci­té, jus­tesse, empa­thie sont les clés des marques qui sor­ti­ront conso­li­dées de cette épreuveavec un béné­fice tan­gible en sor­tie de crise.

Il est temps de rele­ver ses manches. On en parle ?